Le Trésor National

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Via Vitae, « Chemin de Vie »
de Joseph Chaumet, orfèvre parisien (1852-1928)

Oeuvre réalisée en 1904 et classée Trésor National en 2000
H : 2,70 m ;  l : 3 m
Acquise en 2000 par la Ville de Paray-le-Monial
Avec l’aide du Fonds national du patrimoine
du Fonds Régional d’Acquisition des Musées de France
et du mécénat culturel


Joseph Chaumet (1852-1928)
Christus Vincit, détail, ©JP Gobillot

En épousant Marie, la fille de Prosper Morel, en 1875, Joseph Chaumet s’introduisait dans la maison éponyme dont il prit la gérance en 1885, puis le contrôle en 1889, et qu’il installa au numéro 12 de la place Vendôme à Paris en 1907. La maison de joaillerie Chaumet, l’un des principaux fournisseurs des cours d’Europe, allait connaître de 1880 à 1914 pendant la Belle Epoque et sous la direction de Joseph Chaumet, une créativité sans précédent.
Le remarquable discernement de Joseph Chaumet en matière de pierres précieuses et de perles lui valut de recueillir des investissements importants consentis par les banquiers Louis Singer, Edgar Stern et le baron Gustave de Rothschild, ainsi que par des figures éminentes de la haute société internationale, tels le prince Henckel von Donnersmark et
la princesse de Monaco.
Comme son prédécesseur Nitot, Chaumet avait su réaliser des bijoux dans l’esprit de son temps, tout en contrôlant chaque étape de la création, du dessin à la finition.  Commerçant dynamique à l’esprit d’initiative, Chaumet fut présent à toutes les grandes expositions qui marquèrent son temps, notamment celle de Paris en 1900 où il reçut la Médaille d’or avec l’œuvre intitulée Christus Vincit.


Une œuvre personnelle
portrait de J. Chaumet

Ce « Chemin de vie » est une œuvre exceptionnelle réalisée en matériaux précieux : or et ivoire pour les cent trente huit figurines représentant les scènes de la vie du Christ, argent doré et patiné et cristal de roche formant la Trinité dans une gloire, platine, diamants et rubis figurant  l’Eucharistie, marbres de différentes couleurs, albâtre, onyx et bronze doré constituant le socle et les décors de chaque scène.

Présentée dans les salons de la joaillerie Chaumet, place Vendôme, à Paris, jusqu’en 1993 où elle fut démontée, elle n’était accessible qu’à quelques visiteurs privilégiés. Joseph Chaumet réhabilite ici l’adage médiéval que rien n’est trop beau pour Dieu en choisissant de nobles matériaux, travaillés jusqu’aux moindres détails.

La Via Vitae ne sortit pas de ses cartons et sans objectif de présentation, les héritiers exercèrent leur droit de reprise sur les trois œuvres en 1958. La Via Vitae fut remontée au premier étage de la Maison Chaumet, dans le salon d’exposition à proximité de la salle des Modèles, dans les années 1970, jusqu’à son démontage et sa présentation au musée du Hiéron en 2005.


Une œuvre engagée
Atelier Chaumet, détail du Christ au jardin des Oliviers

Dans un souci mystique et en réaction contre l’anticléricalisme ambiant de la fin du 19e siècle, l’artiste tente « un essai de représentation artistique, à l’aide de pierres et de métaux précieux, des notions que l’humanité a de Dieu et de sa nature, des êtres et de leur nature, des rapports mutuels des êtres et de leur relations avec le Créateur ».

L’œuvre a été pensée de manière symbolique. Le roc « représente la matière à travers laquelle circule la vie qui a sa source en Dieu » ; cette dernière est matérialisée par le fleuve qui, sous le Christ ressuscité, jaillit du tombeau ouvert par un ange, « sortant de Dieu sans que l’on puisse pénétrer le mystère de son origine, symbole de la vie, il traverse le tombeau du Christ pour montrer que la mort de Dieu Rédempteur… a régénéré ainsi la source de la vie ».

Bien que la Maison Chaumet eut par le passé exécuté des bijoux et des objets d’art à caractère religieux, ce fut Joseph Chaumet qui œuvra le plus pour développer cette activité. En effet, la proximité d’une clientèle réunissant les plus ardents défenseurs de l’Eglise  lui fit réaliser de nombreux objets ornés de sujets religieux. Sa proximité avec le clergé suscita des commandes d’objets liturgiques : calices, ciboires, ostensoirs ou bijoux tels les anneaux épiscopaux. Pour le couronnement de Notre-Dame de Consolation à Hyères en 1909, il crée les couronnes en vermeil et pierre de couleur des statues de la Vierge et de l’Enfant Jésus, commande émanant de l’évêque de Fréjus.

“Sanglé dans sa redingote noire comme une soutane, barbe grise et longue figure de missionnaire ascétique”, ainsi figure Joseph Chaumet sur les deux portraits que nous lui connaissons. Ne confiait-il pas tout jeune homme à son beau-père Prospel Morel sa profession de foi qui a nourri toute son existence : “Avec l’aide de Dieu j’espère atteindre le Ciel. Je compte sur l’aide de Dieu pour bénir mes efforts et me donner la force nécessaire pour atteindre au but.”